En 2001, le Ministère de la Santé avait élaboré un programme destiné à améliorer l’état de santé de la population française par l’alimentation et l’activité physique. Ce programme, connu sous le nom de Programme National Nutrition Santé est révisé tous les cinq ans et est consultable sur le site www.mangerbouger.fr.
L’année 2015 clôturera le 3ème volet du PNNS et débouchera sur de nouveaux axes destinés, toujours, à améliorer la prévention nutritionnelle et lutter contre les maladies liées à la nutrition (obésité, diabète, maladies cardiovasculaires, etc.).
Revenons en arrière…
Le PNNS 1 (2001-2005) posait les bases de 9 objectifs nutritionnels prioritaires définis par le HCSP (Haut Conseil de la Santé publique) ainsi que de 10 objectifs spécifiques.
PNNS 1 (2001-2005) |
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9 objectifs prioritaires |
10 objectifs spécifiques |
1. Augmenter la consommation de fruits et légumes2. Augmenter la consommation de calcium3. Réduire l’apport lipidique à moins de 35% des apports énergétiques journaliers avec une réduction des acides gras saturés4. Augmenter la consommation de glucides à plus de 50% des apports énergétiques journaliers en favorisant les glucides complexes et fibres et réduisant les sucres simples5. Diminuer la consommation d’alcool6. Réduire le mauvais cholestérol (LDL)7. Réduire la pression artérielle systolique chez les adultes8. Réduire et interrompre la prévalence du surpoids et de l’obésité, surtout chez les enfants9. Augmenter l’activité physique quotidienne à au moins 30min d’intensité modérée au minimum 5 fois par semaine | 1. Réduire la consommation de sel à moins de 8g par personne et par jour2. Diminuer les anémies chez la femme enceinte3. Améliorer le statut en folates chez les femmes en âge de procréer et en cas de désir de grossesse4. Promouvoir l’allaitement maternel5. Améliorer le statut en calcium et vitamine D des enfants et adolescents et réduire l’anémie chez les enfants en bas âge6. Prévenir, dépister et limiter la dénutrition des personnes âgées et améliorer leur statut en calcium et vitamine D7. Réduire la déficience en iode8. Améliorer l’alimentation des personnes défavorisées, notamment en réduisant les déficiences vitaminiques et minérales9. Protéger les sujets suivant des régimes restrictifs contre les déficiences vitaminiques et minérales et prendre en charge les problèmes nutritionnels des personnes présentant des troubles du comportement alimentaire10. Prendre en compte les problèmes d’allergies alimentaires |
Ces objectifs avaient notamment donné lieu aux conseils nutritionnels suivants :
Eau à volonté, minimum 1,5 L par jour
Féculents à tous les repas
Au moins 5 fruits et légumes par jour
3 à 4 produits laitiers par jour
Viande, poisson, œuf : 1 à 2 fois par jour
Matières grasses : à limiter
Produits sucrés : à limiter
Sel : à limiter
Activité physique : au moins l’équivalent de 30 min de marche rapide par jour pour les adultes et au moins une heure pour les enfants et adolescents
Le PNNS 2 (2006-2010) élaborait 4 plans d’actions et le PNNS 3 (2011-2015) présentait 5 axes stratégiques.
PNNS 2 (2006-2010) |
PNNS 3 (2011-2015) |
4 plans d’action |
5 axes stratégiques |
1. Prévention nutritionnelle2. Dépistage et prise en charge précoce des troubles nutritionnels3. Prendre des mesures concernant les populations défavorisées4. Renforcer les pôles recherche et expertise | 1. Réduire les inégalités sociales par des actions de prévention2. Développer l’activité physique et sportive et limiter la sédentarité3. Valoriser le PNNS comme référence pour les actions en nutrition4. Assurer formation, surveillance, évaluation et recherche5. Organiser le dépistage et la prise en charge des troubles nutritionnels (obésité, dénutrition) ;Création du PO (Plan Obésité) |
Evaluation du PNNS…
En 2007, le professeur Serge Hercberg, en sa qualité de président du Comité de pilotage du PNNS avait élaboré une évaluation, publiée en 2007, des actions mises en place depuis 2001.
Cette évaluation s’appuie sur les résultats de l’Etude nationale nutrition santé (ENNS, 2006) qui recense des données sur les indicateurs des objectifs du PNNS.
De plus, sur le plan quantitatif, cette évaluation montre que plus de ¾ des actions prévues ont été réalisées, notamment en matière de communication, information, éducation, développement de la recherche et mise au point de moyens de surveillance.
Au contraire, les axes impliquant les systèmes de soins et acteurs économiques et ceux visant à développer des mesures et actions destinées à des groupes spécifiques de population ont du mal à se mettre en place, notamment au regard de l’insuffisance des moyens ou de la faible mobilisation de certains acteurs.
Indicateurs |
Résultats |
Surpoids et obésité chez les adultes et les enfants | Pour les enfants de 5 à 17 ans : 18% en surpoids et 4% en obésité ; pour les adultes : 32,3% en surpoids et 15% en obésité (Source : ObEpi-Roche 2012 pour les adultes) |
Pression artérielle chez les adultes | Hypertension : 31% des adultes |
Cholestérolémie chez les adultes | Dyslipidémies (taux anormal de concentration en lipides dans le sang) : 44% |
Statut en vitamine D chez les adultes | Déficience : 4,4% ; risque de déficience : 34% |
Anémie ferriprive chez les femmes en âge de procréer | 3% des femmes en âge de procréer |
Risque de déficit en folates chez les femmes en âge de procréer | 6,8% des femmes en âge de procréer |
Activité physique (AP) et sédentarité | 63% des adultes et 71% des adolescents (15-17 ans) pratiquent au moins 30min d’AP au moins 5j par semaine ;60% des adolescents de 11-14 ans pratiquent au moins 150min d’AP par semaine53% des adultes et 39% des enfants de 3 à 17 ans passent au moins 3h par jour devant un écran |
Source : ENNS, 2006
Indicateurs |
Résultats |
Consommation de fruits et légumes | 35% des adultes et 58% des enfants consomment moins de 3,5 portions par jour ;43% des adultes et 20% des enfants en consomment plus de 5 par jour |
Apports en calcium | 33% des adultes et 29% des enfants ont des apports en calcium supérieurs aux recommandations |
Consommation de produits laitiers | 29% des adultes et 43 % des enfants ont un apport conforme ;15% des adultes et 11% des enfants dépassent les recommandations |
Apports en glucides | L’apport en glucides représente 45,5% de l’apport énergétique des adultes, et 48% pour les enfants ;Les adultes consomment 24% de glucides complexes et les enfants 33% |
Consommation de féculents | 49% des adultes et 33% des enfants consomment 3 à 6 portions de féculents par jour |
Apports en lipides | L’apport en lipides est de 37% de l’apport énergétique pour les adultes et de 36% pour les enfants ;L’apport en acides gras saturés (AGS) est de 38% sur le total de l’apport lipidique pour les adultes et de 39% chez les enfants |
Consommation de matières grasses ajoutées | Elle est de moins de 16% pour 91% des adultes et 97% des enfants |
Consommation de viandes, volailles, produits de la pêche et œufs | La moitié de la population consomme 1 à 2 portions de protéines d’origine animale par jour |
Apports en sel | La moyenne est d’environ 8,5 g par jour chez les adultes et 6,9 g par jour chez les enfants |
Consommation de boissons non alcoolisées | Plus de 70% des adultes et 15% des enfants consomment plus d’un litre d’eau par jour |
Consommation de boissons alcoolisées | 20,5 % des adultes se déclarent abstinents et sur le reste, 23% consomment l’équivalent de 20g d’alcool par jour ou plus |
L’étude INCA 2 (Etude individuelle des consommations alimentaires) menée par l’ANSES avait permis en 2007 de dresser un tableau des signes encourageants et des points à améliorer.
Signes encourageants |
Points à améliorer |
Augmentation de la consommation de fruits et légumes chez les adultes et adolescents. | L’alimentation des français reste trop pauvre en glucides et en fibres |
Diminution de la consommation des boissons alcoolisées chez les adultes | Tendance à la déstructuration du rythme alimentaire chez les plus jeunes (15-35 ans) |
Diminution de la consommation de sel, néanmoins insuffisante | Les jeunes adultes consomment insuffisamment de fruits et légumes |
Stabilisation des apports énergétiques chez les adultes et diminution sensible chez les enfants de moins de 14 ans | Le niveau d’activité physique des français reste globalement insuffisant, surtout chez les jeunes filles (15-17 ans) |
Source : INCA 2, 2007
Et récemment…
En 2012, la ministre de la Santé avait demandé de nouvelles propositions destinées à donner un nouvel élan au PNNS et au PO, dans le cadre de la Stratégie Nationale de Santé Publique.
En novembre 2013, le professeur Serge Hercberg a proposé un rapport des « mesures concernant la prévention nutritionnelle » qui sont au nombre de quinze.
Propositions de mesures concernant la prévention nutritionnelle |
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1 | Pérenniser le PNNS, en intégrant le PO, en tant que programme de santé publique et amplifier ses actions visant à lutter contre les inégalités sociales la santé et ciblées vers la jeunesse |
2 | Mettre en place un système d’information nutritionnel unique sur la face avant des emballages des aliments : « l’échelle de qualité nutritionnelle du PNNS » |
3 | Réguler la publicité en fonction de la qualité nutritionnelle des aliments |
4 | Taxer les industriels en fonction de la qualité nutritionnelle des aliments |
5 | Offrir à tous (et notamment aux populations défavorisées) des conditions favorables à une activité physique et sportive |
6 | Améliorer l’accessibilité à l’eau |
7 | Améliorer l’offre alimentaire dans les distributeurs automatiques de produits alimentaires |
8 | Règlementer la teneur en sel et en fibres du pain et des produits de panification |
9 | Distribuer des coupons « fruits et légumes » et « sport » aux populations défavorisées |
10 | Implanter des marchés et jardins communautaires dans les zones défavorisées |
11 | Interdire les promotions au volume pour les aliments et boissons dont la qualité nutritionnelle est considérée comme défavorable à la santé |
12 | Utiliser le temps périscolaire pour faire de l’activité physique, promouvoir l’éveil au goût et éduquer à la lecture du système d’information nutritionnelle |
13 | Promouvoir la diversité de l’image du corps : interdire les retouches de photo dans les magazines et journaux et faire défiler des mannequins avec un IMC supérieur à 19 ;Donner un cadre juridique de protection des personnes obèses (pénalisation de la discrimination |
14 | Faire des campagnes de communication gratuites pour l’INPES [1] sur les chaines de télévision publiques et privées |
15 | Fournir les moyens aux structures concernées de mettre en place l’évaluation des mesures mises en place et l’atteinte des objectifs du PNNS |
Source : Rapport « Mesures concernant la prévention nutritionnelle » du professeur Serge Hercberg
Lien : http://www.ladocumentationfrancaise.fr/var/storage/rapports-publics/144000068/0000.pdf
Dans son projet de loi de Santé, la ministre de la Santé a pratiquement exclu toutes ces propositions, ne retenant que l’idée d’une différenciation sur le plan nutritionnel des divers produits alimentaires. Cet affichage sur les produits serait sur la base du volontariat.
A ce jour, vivement critiqué, le projet de loi sera réexaminé en avril 2015. Peut-être sera-t-il plus abouti au niveau des mesures concernant la prévention nutritionnelle.
Le 6 février 2014, la 3ème étude individuelle des consommations alimentaires (INCA 3), qui finira en février 2015, aura pour but d’actualiser les connaissances des habitudes de consommations alimentaires de la population en France.
En avril 2014, une étude de santé sur l’environnement, la biosurveillance, l’activité physique et la nutrition (ESTEBAN) lancée par l’INVS[2] et avec le soutien de l’INPES a pour but d’évaluer certains aspects de la santé comme l’exposition à certaines substances de l’environnement, l’alimentation, l’activité physique et certaines maladies chroniques ou facteurs de risque de santé.
Ces études et la future loi de santé serviront notamment de base et d’orientation à l’élaboration du 4ème volet du PNNS qui verra le jour en 2016.
Le pôle QSNE du GEDAL
[1] Institut National de Prévention et d’Education pour la Santé.
[2] Institut National de Veille Sanitaire