La réglementation F-Gas s’apprête à être mise en œuvre dans tous les pays de l’Union Européenne. Entre pragmatisme et interrogation, les acteurs se préparent et se mettent en ordre de marche. Décryptage avec Matthieu Paul-Dauphin, directeur achat réfrigération chez Equans France et expert sur le marché du fluide frigorigène.
La réglementation F-Gas est un texte européen destiné à réduire l’impact des fluides frigorigènes sur le climat. Lorsqu’ils sont présents dans l’atmosphère, ces gaz contribuent au réchauffement climatique en raison de leur pouvoir calorifique. Ils participent également à la détérioration de la couche d’ozone. Utilisés dans les circuits de froid, ils sont définis par un GWP, un indicateur de leur pouvoir de réchauffement climatique associé à un niveau d’émissions de CO2 équivalent. La présence de ces fluides dans l’air est essentiellement due aux fuites sur les réseaux.
Quel est l’enjeu de la réglementation ?
» L’enjeu est important puisqu’il s’agit d’éviter l’équivalent de 176 millions de tonnes d’émission de CO2 chaque année en Europe. Des réglementations similaires sont appliquées ou en cours d’application aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne. La révision de la première directive adoptée en 2015 vient d’être votée et son application significativement renforcée sera effective fin mars 2024. Concrètement, il s’agit d’accélérer l’interdiction des fluides frigorigènes ayant un puissant pouvoir calorifique dès à présent. »
Quelles sont les conséquences pour le secteur ?
» Les principaux utilisateurs de fluides frigorigènes sont les acteurs de la production, de la transformation et de la distribution alimentaire : les industriels, les plateformes logistiques et la distribution. En clair, cela concerne toute la chaîne du froid, mais aussi les systèmes de climatisation dans l’ensemble de leurs usages. Le principal émetteur est la grande distribution qui utilise fréquemment ces installations avec des réseaux importants, des chambres froides aux surfaces de vente en passant par les salles des machines. Plus la charge de fluides est importante, plus les risques de fuites augmentent. A l’inverse, avec des systèmes de froid confinés en zone de production et l’utilisation de fluide vert, les industriels sont moins exposés aux conséquences du durcissement de la réglementation. Les conséquences de l’application de la directive devraient rapidement se faire sentir. Dès cette année, le volume de fluides frigorigènes disponible sur le marché va fortement diminuer en raison des quotas mis en place. La tendance va s’accélérer en 2025 avec à la clé une hausse significative des prix et une situation potentielle de pénurie. «
Quelles sont les alternatives pour préserver des équipements opérationnels ?
» La modification de la directive F-Gas va accélérer le remplacement des installations et le recours à des fluides frigorigènes verts (CO2 et propane notamment), c’est-à-dire avec un très faible impact sur le réchauffement planétaire. Des investissements sont déjà programmés chez de nombreux acteurs qui ont anticipé l’évolution de la réglementation et les coûts importants liés à l’acquisition de nouveaux équipements. On estime qu’environ 25 % du parc de la distribution alimentaire est déjà complétement converti à des fluides verts. Il est cependant primordial d’accélérer les investissements nécessaires à la modernisation des installations restantes, compte tenu des délais conséquents de mise en œuvre (12 à 18 mois en moyenne par site). Le défi est d’autant plus important qu’il faudra composer avec une réduction des quotas de fluides frigorigènes traditionnels. Cette réglementation va dans le bon sens pour contribuer à relever le défi climatique. «
SOURCE : PROCESS ALIMENTAIRE
Réglementation F-Gas : des défis à relever au service de la mobilisation climatique | Process Alimentaire